Gros plan sur quelques comestibles de nos forêts
Par Jérémie Boutin, agent de projets en conservation à l’AF2R
Les plantes, arbres et arbustes
Au Québec, nous avons une grande variété de plantes, que ce soit des arbres ou des fleurs, ayant des propriétés alimentaires ou médicinales. Dans cet article, nous vous ferons part de notre liste de végétaux les plus prisés et les plus intrigants que nous retrouvons dans notre belle région pour vous les faire découvrir et peut-être même vous donner le goût de les essayer.
Nous voulons d’abord vous rappeler que la cueillette de produits forestiers doit toujours être faite de façon durable et en respectant la faune et la flore. Il faut récolter les produits de façon à protéger les ressources. On ne récolte jamais le plant en entier et on s’assure de laisser des feuilles et des fruits sur un plant. Pour les feuilles, il faut essayer de ne pas prendre les jeunes feuilles de l’année, puisque cela pourrait ralentir significativement la croissance de la plante. Pour les fruits, on ne récolte les baies d’un seul plant sur trois pour permettre la dispersion des semences.
De plus, nous vous demandons d’agir avec prudence lorsque vous consommez des produits naturels comme ceux-ci. Si vous avez un doute quant à l’identification de la plante, il vaut mieux s’abstenir de la récolter et de la consommer. Plusieurs plantes sont toxiques et peuvent avoir des effets graves sur la santé si elles sont consommées. De plus, certaines plantes sont à proscrire si vous êtes une femme enceinte, un enfant de moins de 6 ans ou si vous souffrez d’une maladie. Informez-vous auprès de personnes qualifiées ou de votre médecin.
MYRIQUE BAUMIER
Le myrique baumier (Myrica gale), également appelé bois-sent-bon, est un petit arbuste pouvant atteindre la hauteur de 1,5 mètre. Il a des feuilles en forme de spatule, de couleur vert foncé sur le dessus et vert pâle en dessous. Ses fleurs sont en forme d’épis cylindriques et ses fruits vont devenir des petites boules brunes presque écailleuses. On se sert également de ses bourgeons pour faire des teintes jaunes de vêtement.
Où le trouve-t-on? : Partout au Québec et dans les maritimes dans les milieux humides, sur le bord des tourbières, des lacs et des cours d’eau.
Partie comestible : Feuilles et bourgeons.
Quand le cueillir? : Durant toute l’année, puisque les fruits persistent même durant l’hiver.
Comment le consommer : Les feuilles sèches ou fraîches se consomment en infusion ou comme épices et les bourgeons comme assaisonnement dans les plats.
GAULTHÉRIE COUCHÉE
La gaulthérie couchée (Gaultheria procumbens), également appelée le thé des bois, est une petite plante qui ne dépasse pas les 15 centimètres de largeur et qui ne produit que quelques feuilles. Ses feuilles sont d’un vert vif au printemps et plus tard dans la saison, on peut remarquer l’apparition de taches de couleur grenat sur celles-ci. La gaulthérie couchée produit de petites fleurs blanches qui finiront par produire une petite baie d’un rouge vif. Cette plante est reconnue pour ses huiles essentielles qui sont très prisées dans le domaine du sport, puisqu’elles agissent comme un excellent antidouleur musculaire et articulaire dû à ses propriétés analgésiques et anti-inflammatoires. Il faut toutefois limiter son utilisation.
Où la trouve-t-on? : Partout au Québec dans les forêts mixtes et résineuses, mais son habitat préféré est auprès des pins.
Partie comestible : Feuilles et fruits.
Quand la cueillir? : La cueillette des fruits se fait tout l’été.
Comment la consommer : Les feuilles sèches ou fraîches se consomment en infusion. Les fruits se consomment frais.
GAULTHÉRIE PETIT-THÉ
La gaulthérie petit-thé (Gaultheria hispidula) fait partie de la même famille que le thé des bois. Cette plante ressemble à une tige rampante. Il ne faut pas confondre cette plante avec la linnée boréale qui elle est toxique. La principale différence entre ces deux espèces est que les feuilles de la linnée boréale sont disposées de manière opposée l’une à l’autre sur la tige. Ce sont des petites feuilles rondes, pas plus grosses qu’un petit pois. Les feuilles ont des propriétés calmantes et aident également à combattre les maux de tête. Le petit-thé des bois produit une petite fleur blanche qui se transforme en petites baies blanches recouvertes d’un duvet.
Où la trouve-t-on? : Cette plante pousse généralement sur des sols frais et humides, dans des forêts mixtes ou de conifères. On la retrouve également un peu partout au Québec.
Partie comestible : Feuilles et fruits.
Quand la cueillir? : La cueillette des baies se fait tout l’été.
Comment la consommer : Les feuilles sèches ou fraîches se consomment en infusion. Les fruits se consomment frais.
LÉDON DU GROENLAND
Le lédon du Groenland (Rhododendron groenlandicum), également appelé le thé du Labrador, est un arbuste qui peut atteindre une hauteur de 1 mètre. Sous la feuille, il y a présence d’un duvet qui change de couleur avec l’âge, c’est-à-dire que les nouvelles feuilles ont du poil blanc alors que les feuilles plus âgées sont d’une couleur orangée, puisque les feuilles sont persistantes. Les feuilles sont également très odorantes. Le lédon produit des fleurs blanches en ombelle et celles-ci deviendront des fruits en forme de petite capsule. Les principales propriétés de la feuille et de la fleur sont la réduction du stress et des troubles du sommeil. Il est également possible d’en faire des huiles essentielles.
Où le trouve-t-on? : Dans des milieux humides, non loin de tourbières. Il est davantage répandu dans le nord du Québec et dans les maritimes.
Partie comestible : Feuilles et fleurs.
Quand le cueillir? : Du début juillet à la mi-août.
Comment le consommer : Les feuilles sèches ou fraîches en infusion et la fleur sèche en infusion.
CHICORÉE SAUVAGE
La chicorée sauvage (Cichorium intybus) est une mauvaise herbe pas si mauvaise qu’elle en paraît. Cette plante possède l’habileté de pivoter pour que sa fleur soit toujours face au soleil. C’est une fleur des champs de couleur bleutée. On retrouve plusieurs fleurs et feuilles sur une même tige. Cette plante est surtout connue pour ses facultés médicinales. En tonic, elle est excellente pour le foie, la digestion, le sang et pour la perte de poids. La chicorée est également un excellent vermifuge, autant pour l’homme que les animaux.
Où la trouve-t-on ? : Un peu partout dans le voisinage et sur les bords de routes et ce, un peu partout au Québec.
Partie comestible : Fleurs et jeunes feuilles.
Quand la cueillir? L’été.
Comment la consommer : Les feuilles fraîches sont excellentes en salade et la fleur fraîche est une très bonne source en vitamines. Feuilles et fleurs sèches en tonic.
NOYER CENDRÉ
Le noyer cendré (Juglans cinerea) est l’un des seuls arbres au Québec arborant des feuilles composées et alternes. Sa croissance en hauteur et en largeur est très rapide. Le noyer produit des fleurs en forme de chatons lors de la reproduction. Ces fleurs vont former de grosses noix à l’automne (d’où son nom anglais Butternut). Vous aurez toutefois un peu de difficulté à retirer la noix de sa capsule, puisqu’elle est enveloppée dans un brou épais. Cette espèce d’arbre est malheureusement victime depuis quelques décennies d’un champignon exotique appelé le chancre du noyer qui finit par tuer l’hôte. Par conséquent, le gouvernement du Canada a désigné le noyer cendré comme étant en voie de disparition à travers son aire de répartition, incluant le Québec.
Où le trouve-t-on? : Poussant seul ou en petits groupes dans les forêts feuillues mixtes du sud du Québec et de l’Ontario. C’est toutefois une essence assez rare de nos forêts.
Partie comestible : Fruits.
Quand le cueillir? : Mi-septembre à début octobre.
Comment le consommer : Après avoir retiré le brou et la capsule, la noix se mange fraîche. Elle peut aussi très bien être ajoutée à l’une de vos recettes préférées.
Fait à noter : Son bois est très prisé chez les artisans en raison de sa couleur foncée et de sa dureté.
Pour plus d’information sur les arbres à noix comestibles, cliquez ici.
Les champignons
Au Québec, nous avons un grand nombre d’espèces de champignons forestiers, plus bizarres et mystérieux les uns que les autres. On y dénombre plusieurs variétés comme les bolets et les amanites. De couleurs et de formes différentes, il peut être très difficile pour un amateur de les différencier. Ceci n’est pas un passe-temps à prendre à la légère, puisque si on se trompe dans l’identification d’un spécimen, sa consommation peut être très dangereuse. Si vous voulez vous lancer dans la récolte de champignons, nous vous conseillons fortement de suivre un cours ou une formation sur la cueillette de champignons forestiers et de vous procurer un bon guide d’identification avant de vous lancer.
CÈPES
Les cèpes sont des champignons de la famille des bolets. On dénombre six espèces de cèpes au Québec dont quatre d’entre elles sont très fréquentes. Il ne faut cependant pas les confondre avec le bolet amer qui lui est non-comestible. Toutes les espèces de cèpes du Québec sont comestibles et savoureuses. L’espèce la plus fréquente et la plus populaire est le cèpe d’Amérique. Celle-ci est souvent dotée d’une tête ronde de coulée variant entre le brun pâle et le brun foncé avec des touches d’oranges et d’un pied de couleur blanche. Chacune des espèces a une préférence de peuplement forestier près duquel pousser. La plupart des espèces de cèpes poussent de la mi-juillet à la mi-septembre.
CHANTERELLES
Les chanterelles sont les champignons comestibles les plus connus. On en compte deux familles au Québec qui comportent en tout une quinzaine d’espèces, pour la plupart faciles à identifier et délicieuses au goût. Seule la chanterelle à flocons est déconseillée à la consommation. L’espèce de chanterelle la plus commune et la plus savoureuse est la chanterelle commune. On peut trouver ces champignons dans la plupart des forêts, puisqu’ils vivent en symbiose avec de nombreuses espèces d’arbres présents au Québec. Toutefois, les chanterelles préfèrent les chênaies et les sapinières. Le meilleur moyen de les distinguer est par leur couleur, souvent d’un jaune orangé, et par leur l’absence de séparation entre la tête en forme d’entonnoir et le pied. On peut les trouver durant presque tout l’été, soit du mois de juillet jusqu’au mois d’octobre, si la météo le permet.
DERMATOSE DES RUSSULES
La dermatose des russules (Hypomyces lactifluorum), également appelée le champignon homard (lobster mushroom en anglais), est l’un des plus étranges champignons. En revanche, comme son nom l’indique, son goût est renversant, car il a la texture et les arômes de la chair de homard. Ce champignon est particulier, puisqu’il est le produit fini d’un parasitage d’un autre champignon, la russule à pied court, celle-ci étant beaucoup moins savoureuse. À notre avantage, il est très facile à identifier, puisqu’aucun autre champignon ne lui ressemble. Il pousse souvent sur les terrains dotés d’un sol compact, autant en forêts feuillues que dans les forêts de conifères. Il pousse durant le mois d’août à septembre.